Neltje Green



Each Time I Remember
2023 | acrylique sur bois



Un échange entre Neltje Green et Élise Ares Poliquin

Traduit de l’anglais par Filémon Brault-Archambeault


É : Commençons par une présentation de toi-même et de ta pratique.


N : Mon nom est Neltje Green, mais on m’appelle Nel. Je peins depuis plus d’une décennie et je développe le style dans lequel je travaille en ce moment durant les cinq ou six dernières années, je dirais. Je travaille principalement avec l’acrylique comme j’étudie le design, j’essaie aussi de transférer l’esthétique que j’ai développée vers d’autres médiums comme les zines et les livres.

Je suis de Montréal, mais aussi de Toronto et de la Caroline du Nord. Je suis de retour à Montréal depuis quelques années maintenant, pour mes études.

Ma pratique se développe encore et j’essaie de trouver ma niche et à quel point je suis prête à explorer. Je suis très confortable dans ce que je produis maintenant, mais je me demande si je devrais ajouter d’autres aspects ou explorer d’autres médiums.

Les espaces que je peins ne sont jamais basés sur la réalité et je soustrais toujours beaucoup d’éléments et j’essaie de simplifier le tout aux quelques aspects majeurs de l’espace qui me semblent nécessaires. Je minimise toujours même si ça reste chargé avec le color blocking, et j’essaie de réduire ça à ce dont il me semble nécessaire de me souvenir à propos de l’espace. Il y a aussi cet aspect de la mémoire où on ne se souvient jamais complètement d’une chose, mais plutôt juste de morceaux et d’éléments, donc c’est ce que j’essaie de communiquer avec mes toiles.


É : Il semble que dans ton œuvre, tu tentes d’accomplir une conservation, particulièrement avec ton intégration de plusieurs éléments distinctifs de l’architecture montréalaise qui disparaissent lentement, comme ces fenêtres détaillées.


N : Le concept derrière l’ensemble de mes œuvres en général est d’essayer de conserver visuellement des espaces qui ont une grande signification pour moi, en les peignant ou avec mes sculptures mouvantes de fenêtres. Celles-ci sont toutes des fenêtres d’êtres aimés. S’ils décédaient ou déménageaient, j’utiliserais les éléments physiques et visuels de leurs espaces de vie pour conserver leur souvenir et j’imagine que c’est lié à ce que tu dis. En revenant ici (Montréal), je me souviens de tous ces souvenirs à travers les maisons typiques de Montréal. Ça paraît quand une fenêtre vient d’ici.

Ces trois toiles sont mes plus récentes. Ces deux-là (images sur la droite) sont un diptyque des lieux dans lesquels j’ai vécu plus récemment à Montréal. J’ai tenté de capturer l’espace et tous les gens qui sont venus et repartis pendant que j’habitais là. Elles ont été réalisées pendant une résidence que j’ai faite au MBAM, alors j’étais un peu pressée de les finir mais la troisième est plus récente, et j’ai travaillé dessus pour un de mes cours.

J’imagine que je fais vaguement référence aux images que j’ai prises durant mon temps là-bas et que je les utilise pour comprendre comment la lumière fonctionne, et j’aime ajouter des détails élaborés pour contraster avec le color blocking qui occupe la plus grande partie de l’espace. Généralement, je ne mets pas de gens dans mes toiles, et je préfère tenter de les représenter à travers les espaces que je peins. Je fais ça depuis aussi longtemps que je puisse me souvenir donc ça m’a semblé naturel de continuer à explorer ce domaine.


É : Pour toi, comment ta pratique est-elle reliée au thème des passages?


N : Quand j’ai entendu parlé du thème de ce numéro au lancement, mon ami Yann Parriot (qui a été publié dans le premier numéro) m’a dit que je devrais appliquer parce que ça tombait pile dans ce que je faisais. J’ai eu l’impression que ça résonnait avec ce que je fais. L’exposition que j’ai faite au Musée des beaux-arts s’intitulait Threshold, et j’y parlais de l’utilisation des espaces comme des passages entre la réalité, les souvenirs et les gens.